A question of size! The Importance of Marine Crabs in Food Remains from Mesolithic Fisher-Hunter-Gatherers at Beg-er-Vil (Quiberon, Morbihan, France)

 DUPONT C., GRUET Y., ARTHUR M., DIGARD O., 2023 - A question of size! The Importance of Marine Crabs in Food Remains from Mesolithic Fisher-Hunter-Gatherers at Beg-er-Vil (Quiberon, Morbihan, France). In : Marchand G., Pailler Y., Stéphan P., (eds.), Investigate the Shore, Sound out the Past: Methods and Practices of Maritime Prehistory Explorer la côte, sonder le passé : méthodes et pratiques de la préhistoire maritime. Actes de la séance de la Société préhistorique française de Brest (décembre 2020), Paris, Société préhistorique française, (Séances de la Société préhistorique française, 19), ISSN : 2263-3847 – ISBN : 978-2-913745-92-6, p. 107-122. https://www.prehistoire.org/offres/file_inline_src/515/515_P_50815_64a7cda7834eb_8.pdf

 


 

Fig. –Crab spectra in Beg-er-Vil 1985-1988 and Beg-er-Vil 2013 (CAD C. Dupont).

Fig. – Spectre des crabes de Beg-er-Vil 1985-1988 et de Beg-er-Vil 2013 (DAO C. Dupont).

 

Résumé

Des fouilles ont été menées dans les amas coquilliers dès la première moitié du XXe siècle le long de la côte atlantique européenne. Plus de 330 d’entre eux sont actuellement recensés pour le Mésolithique. Ils doivent leur conservation partielle à un ralentissement de l’augmentation du niveau de la mer. Pour le littoral atlantique français, les plus anciens datent d’il y a 8000 ans. L’intérêt pour la composition en coquillages de ces accumulations était encore peu développé à la fin du XXe siècle ; si une liste d’animaux était parfois publiée, les invertébrés marins y étaient souvent oubliés ou ne représentaient que quelques lignes dans les articles. Force est de constater qu’ils sont souvent associés à du sédiment au pH basique qui a permis la conservation des ossements. Par le passé, seuls les éléments jugés utiles à la fouille étaient conservés, comme les silex, les ossements de grands mammifères. L’hégémonie de la chasse aux grands gibiers et les valeurs qu’elle véhicule n’y sont sans doute pas étrangères. De même, les parures et éléments associés aux sépultures étaient privilégiés à la fouille. Ainsi, malgré le tamisage des sédiments, ces fouilles passées nous ont donné une image très partielle des restes alimentaires de ces populations, où les invertébrés marins sont souvent les parents pauvres des vestiges archéozoologiques. Le développement de nouvelles disciplines en archéologie a rapidement montré les limites de ces fouilles anciennes et les hiatus liés au choix des archéologues. Le retour sur le terrain dans les années 2000 a permis, grâce au tamisage combiné au tri en laboratoire, d’accroître notre vision de la diversité des ressources marines et terrestres exploitées par les populations côtières mésolithiques. Désormais, mollusques et crustacés accompagnent poissons, oiseaux et mammifères marins au côté des mammifères et oiseaux terrestres.  Une minorité visible a été conservée jusqu’à nous sous la forme de fragments de crabe mesurant moins de 1 cm. Souvent, un crabe consommé par ces populations mésolithiques se traduira, pour l’archéologue, par la découverte de minuscules fragments d’extrémités de doigts de pince. Le rendement élevé de ces crustacés – si le poids de leur squelette est considéré par rapport à celui de la chair qu’il fournit – pourrait pourtant en faire un des éléments clés de l’alimentation de ces peuples du bord de mer. La question posée par cet article est de savoir si la méthode de prélèvement influe sur notre vision du mode de vie des populations mésolithiques. Pour y répondre, le site de Beg-er-Vil, localisé au nord-ouest de la France, sur la côte sud de la Bretagne, a été choisi. Dans les années 1980, O. Kayser avait fouillé cet amas. Il avait alors réalisé un tamisage à sec des sédiments de l’amas à 4 mm et avait stocké les refus de tamis dans des sacs en papier kraft. Lors de la reprise de l’étude de l’amas, dans les années 2000, ces refus ont été tamisés en laboratoire, à l’eau douce, sur des mailles de 5 mm et de 2 mm. Dans les années 2010, le site a été fouillé à nouveau, sous la responsabilité de G. Marchand et de C. Dupont. Avec leur équipe, ces derniers ont tamisé tout le sédiment à l’eau de mer, puis ils l’ont rincé à l’eau douce avec des tamis de 4 et de 2 mm. Le matériel de 1980 a subi un tamisage en laboratoire lors de la reprise de l’étude des composants de l’amas dans les années 2000. Il a été réalisé à l’eau douce sur des mailles de 5 et de 2 mm. Les crabes de ces différentes campagnes de fouille ont en partie été étudiés : ceux retenus sur la maille de 5 mm pour les fouilles des années 1980, avec un contrôle visuel de ce qui a été retenu sur la plus petite maille ; et l’intégralité des restes retenus sur les refus de tamis de 4 mm et de 2 mm pour les fouilles des années 2010. Les restes de crabe ont été décomptés suivant les méthodes classiques de l’archéozoologie : nombre de restes, nombre minimum d’individus et poids. Des reconstitutions de la largeur des carapaces ont aussi été réalisées. Cette étude met en évidence des interprétations différentes de l’exploitation du crabe par les derniers chasseurs-cueilleurs de la côte atlantique française en fonction de la maille de tamisage utilisée. La maille la plus fine permet de déterminer plus d’espèces. Les petites espèces ont clairement été évincées lors de l’analyse sur la maille de 5 mm. Au total sept espèces ont pu être déterminées : le dormeur ou tourteau Cancer pagurus Linnaeus, 1758, le crabe verruqueux Eriphia verrucosa (Forskål, 1775), le crabe vert Carcinus maenas (Linnaeus, 1758), l’étrille Necora puber (Linnaeus, 1767), le crabe enragé Xantho sp. (Leach, 1814), le crabe marbré Pachygrapsus marmoratus (J.C. Fabricius, 1787) et l’araignée de mer Maja squinado (Herbst, 1788). Cette diversité observée aussi sur les gabarits des crabes montre une exploitation de tous les individus accessibles sur l’estran, qu’ils soient grands ou petits. Le cas de l’araignée de mer mérite d’être souligné. En effet, de nos jours, cette espèce est généralement subtidale. Elle se rapproche des côtes lorsque l’eau de mer se réchauffe, actuellement à la fin du printemps. Elle a pu être pêchée à ce moment-là par les populations mésolithiques. Les fragments de crabe prélevés en 2013 sur les tamis de 4 mm et de 2 mm ont été observés en fonction de la stratigraphie : ils montrent une conservation plus importante au coeur de l’amas. Les parties sommitales et basales de ce dernier semblent encore subir l’acidité du milieu. Ce résultat est intéressant et pourrait expliquer le fait que, dans les années 1980, certains doigts de crabe ont été isolés à vue à la fouille, à la différence des années 2010 où ces vestiges étaient tellement petits qu’ils n’ont pas été repérés lors la phase de terrain. Ils montrent que le système représenté par l’amas n’est sans doute pas stabilisé. Quoi qu’il en soit, cette étude indique que les crabes doivent, comme tout artefact, être pris en compte. Ils permettent de décrire des activités liées à la mer, comme la pêche à pied sur estran et peut-être même l’exploitation des laisses de haute mer. Ils ont participé à la diversité des aliments consommés par ces populations et, par leur rendement, peuvent constituer des sources non négligeables de nourriture. Ainsi, malgré leur faible lisibilité et la petitesse des fragments conservés, les crabes méritent d’être considérés comme un autre indice du mode de vie des populations de pêcheurs-chasseurs-cueilleurs de nos côtes.

 

Abstract

Abstract: Mesolithic shell middens were excavated along European Atlantic coasts as early as the first half of the 19th century. At the end of the same century, researchers still showed little interest in the composition of these archaeological sites. While bones from mammals have been identified for this type of site, marine invertebrates have often been overlooked. A few short lines were dedicated to them in papers describing shell middens. The development of new disciplines in archaeology soon showed the limitations of past excavations. In fact, only the elements considered to be useful to the person in charge of the excavation have been preserved, such as flint, large mammal bones and ornaments, with an emphasis on burial components. Despite the sieving of sediments, past excavations yielded a very partial version of the food remains of these populations, where marine invertebrates are often the poor relations of the archaeozoological remains. In the 2000s, developments in sieving techniques combined with laboratory sorting made it possible to expand our vision of the diversity of marine and terrestrial resources exploited by these coastal populations. The visible minority, represented by crabs and other invertebrates, is now more commonly described in shell middens. On account of the high meat yield of crustaceans, they may even have been key components in the diet of coastal populations. Moreover, sieving and sorting of remains show that these shell middens are not homogeneous layers of shell. The example of the Beg-er-Vil shell midden shows that our vision of the way of life of fisher-hunter-gatherers along the European Atlantic coast depends on excavation techniques. The methods of excavation applied in the field have a direct impact on our description of the activities of these coastal populations. They were not solely focused on hunting large mammals.

 

https://www.prehistoire.org/offres/file_inline_src/515/515_P_50815_64a7cda7834eb_8.pdf

 

Mots clés : #Pêcheurs #chasseurs-cueilleurs, #crabe, #crustacé, #Mésolithique, #fruits de mer, #alimentation, #méthodologie, #taphonomie, #tamisage.

Keywords: #Fisher-hunter-gatherers, #crab, #crustacean, #Mesolithic, #seafood, #diet, #methodology, #taphonomy, #sieving

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